L'ÉVANGILE DU SERPENT - Pierre BORDAGE

Publié le par Vicklay

Les Prophéties 1
2001
Gallimard Folio n°3861 (avril 2007)
Couverture de Matt LAMB
688 pages


4ème de couverture :

Jeune Indien d'Amazonie élevé en Lozère, Vaï Ka'i incarne la sagesse du serpent double, symbole chamanique de l'ADN. Il prône l'abandon des possessions, le respect de la Terre et accomplit des miracles.
Quatre évangélistes, Mathias, tueur à gages, Marc, journaliste désabusé, Lucie, strip-teaseuse sur le Net, et Yann, premier disciple, racontent celui que la presse surnomme le Christ de l'Aubrac...
Un grand roman contemporain humaniste et une aventure littéraire inoubliable.


L'avis :

Quatre destins, une histoire.

L’Évangile du serpent est un récit typiquement bordagien. C’est avant tout l’histoire de destins qui se rejoignent, tôt ou tard.
Le roman est donc découpé en chapitres, numérotés comme des évangiles (Mathias 1, Marc 1, Lucie 1, Yann 1, puis Mathias 2, et caetera), qui permettent de suivre tour à tour les quatre personnages dans leur progression.
Ces protagonistes sont évidemment très différents les uns des autres, chacun avec son caractère, sa vie, ses aspirations. Ils sont autant de figures caractéristiques, mais pas stéréotypiques de notre civilisation.
Mathias est un tueur à gages, froid, méthodique. C’est un chasseur qui semble totalement fermé aux sentiments. Malgré tout, c’est un personnage de roman de Pierre Bordage : il n’est pas si insensible que cela. Il peut aimer, et il aimera...
Marc est un journaliste travaillant pour un hebdomadaire à mi-chemin entre magazine people et journal satyrique à la Canard Enchaîné. Il doit écrire un article sur Vaï Ka’i. Le parti est déjà pris : il doit découvrir de quoi salir la réputation du prophète. Mais la vérité est qu’il n’y a rien à reprocher au Christ de l’Aubrac. Une crise de conscience s’annonce…
Lucie est une stripteaseuse officiant sur l’Internet. Quand on gagne sa vie de cette façon, on fait parfois des rencontres terribles, parfois merveilleuses. C’est une du premier type qui la pousse à fuir et ainsi en faire une du second. 
Yann, enfin, est un proche de Vaï Ka’i. Il est un de ses disciples, mais pas un illuminé. Il n’est d’ailleurs pas complètement prêt à suivre les préceptes du prophète : retour à la Nature, abandon des possessions matérielles… Il est surtout l’élément qui permet à l’auteur de décrire l’environnement immédiat du Christ de l’Aubrac, mais pas seulement. Car comme les autres personnages principaux du roman, il est un des reflets de notre société.

Plus qu’un roman de science-fiction.

Car L’Évangile du serpent est loin d’être l’histoire toute simple d’un prophète qui va bouleverser la société française en entraînant dans son sillage des dizaines de milliers de personnes. Cette aussi une description juste et sans concession de notre société, extrêmement matérialiste, individualiste, destructrice (et autodestructrice).
Pierre Bordage critique notre façon de vivre, ouvertement mais sans violence, sans brusquer le lecteur. Il met en évidence les côtés absurdes de la société de consommation, de la manipulation des médias par les politiques, du terrorisme, de nombre d’éléments dont on entend chaque jour parler à la télévision, dans les journaux, qui font partie de notre quotidien. On ne peut s’empêcher, en lisant les pages de L’Évangile du serpent, de reconnaître que Bordage voit juste.
Ce roman remet les yeux en face des trous, rappelle que l’on est chaque jour manipulé par les médias, qui ne sont jamais totalement objectifs, que les politiques sont là pour nous servir, pas pour faire ce qui les arrange (ou ce qui arrange ceux qui les contrôlent, à savoir les grandes entreprises) et maintenir le pouvoir qu’ils ont sur nous.
Il nous interpelle, pour que nous prenions conscience des ravages de nos activités sur la Nature, sur le gouffre qui s’est creusé entre nous et Elle. Car les enseignements du prophète Vaï Ka’i sont ceux du respect de notre environnement, qui nous abrite et nous nourrit. En le détruisant, nous nous détruisons en même temps.

En refermant L’Évangile du serpent, on se dit qu’il est dommage que l’on ait lu un roman de science-fiction. La part de fantastique de cet ouvrage (les miracles provoqués par le prophète) est ténue, mais on est en présence d’éléments qui n’existent pas réellement. Dommage, car sinon, qu’est-ce qui pourrait empêcher l’avènement d’un Vaï Ka’i ? Et où serait le mal ? Plutôt, qu’est-ce qui ne serait pas bien ?

Les réponses à ces questions, nous les aurons peut-être dans le deuxième tome de la trilogie des Prophéties, L’Ange de l’Abîme

Publié dans Littératures

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article