LES TOURS DE SAMARANTE - Norbert MERJAGNAN

Publié le par Stéphane

2008
Denoël, Lunes d'Encre (mars 2008)
Couverture de MANCHU
318 pages


4ème de couverture :

Autour de la cité de Samarante sur laquelle veillent six tours mystérieuses, s'étend l'aliène, une étendue sauvage, aride, inhospitalière. C'est par là que la guerre viendra, il n'y a pas d'autre accès. Au cœur de la ville vivent Cinabre, une préfigurée aux pouvoirs effrayants, bientôt poursuivie par les tueurs de l'Endocène, et Triple A, qui rêve d'escalader les tours. C'est vers eux, sans le savoir, que se dirige Oshagan, le grand guerrier, porteur de la plus puissante des armes, une forme de guerre disparue depuis mille ans. Quand ces trois êtres entreront en collision, alors trembleront les Tours de Samarante.

Les Tours de Samarante est le premier roman de Norbert Merjagnan, un récit âpre, d'une rare ambition stylistique, dans lequel le monde tombe en morceaux, la guerre enfle sur chaque horizon et les hommes attendent le Seuil : le passage de l'humanité à une nouvelle espèce biogénique.


Après dix ans passés dans l'Internet au siège d'un grand établissement financier, Norbert Merjagnan a quitté son travail et Paris pour la région nantaise, où il se consacre désormais à sa famille et à l'écriture.


L'avis :

Chronique d'un succès littéraire.

Mars 2008. Les éditions Denoël, collection Lunes d'Encre, publient le premier roman d'un inconnu portant le nom de Norbert Merjagnan. Titre du livre : Les Tours de Samarante. C'est aussitôt la consécration, ou tout du moins un certain succès au sein de la communauté science-fictive.

Avril 2008. Bruno Para indique que le livre est bien sur le splendide site de la nooSFere[1].

Janvier 2009. Les vieux chnoques des déjeuners du lundi[2] adjugent leur prestigieux prix aux Tours de Samarante[3].

Février 2009. Joseph Altairac ouvre le bureau de vote du Prix Rosny Aîné 2009. Dans la liste non exhaustive des romans pour lesquels il est possible de voter se trouve le fameux roman.

Mars 2009. Systar publie son article en six parties sur le roman de Merjagnan, qu'il commence par « Le premier roman de Norbert Merjagnan, Les Tours de Samarante, est un bijou, disons-le d'emblée ».

Avril 2009. Mon vingt-sixième anniversaire. On m'offre Les Tours de Samarante (j'avais orienté le choix du cadeau, évidemment). Je pouvais enfin lire ce roman dont on a déjà beaucoup parlé.

Un excellent travail éditorial.

Je parle ici d'une publication dans la collection Lunes d'Encre des éditions Denoël. Mon propos porte donc sur un livre de fort bonne facture, d'un peu plus de trois cent pages qui a des coquilles qui doivent se compter sur les doigts d'une main[4], doté d'une superbe couverture de Manchu[5].
Je serai loin d'être aussi élogieux concernant le contenu littéraire du roman.

Un univers vaste mais trop peu exploité.

On trouve dans Les Tours de Samarante une histoire de vengeance, celle d'Oshagan, qui s'est exilé dans l'aride pendant des années et revient à Samarante pour punir ceux qui ont décimé sa famille. Le destin de ce guerrier fier et farouche est lié à celui de Cinabre, femme magnifique, chef-d'œuvre de la biogénie samare, dotée d'une empathie hors du commun, et bien plus encore.
Je n'en dirai pas plus au risque de spoiler. Car l'histoire contée par Norbert Merjagnan peut sans problème se résumer en quelques lignes. Elle est plus un prétexte qu'autre chose à la description d'une des villes étonnantes d'un monde autrement désert – ou presque, l'aride étant habité par des peuples qu'on entrevoit à peine – et de la société samare. L'auteur déploie un grand talent pour nous présenter une ville caractérisée par six tours – à l'existence assez anecdotique en fin de compte, ce qui est le comble – et les Ordres qui assurent son bon fonctionnement. Mais on ne trouve rien d'extraordinaire à ces derniers : il y a celui de la police, celui de l'armée, celui des marchands, celui de l'entretien de la cité, et caetera. C'est assez peu original.
Celui des biogénistes, toutefois, est plus étonnant car il travaille à la production des êtres vivants peuplant Samarante, dont une bonne partie des habitants « humains » de la ville. Il travaille aussi à l'avènement d'une nouvelle espèce humaine, qui apparaîtra au moment du Seuil. Je relèverais ici la première « bizarrerie » du roman : la date exacte du Seuil est connue. Les biogénistes savent en effet parfaitement le jour et l'heure où ils achèveront leur travail, alors qu'ils sont encore en train de concevoir cette nouvelle espèce.
Il faut reconnaître que l'univers des Tours de Samarante est assez complexe. L'auteur ne fait qu'en gratter superficiellement la surface dans son roman. Il le décrit toutefois suffisamment pour qu'on ne puisse pas contredire le fait qu'il s'y trouve matière à de multiples aventures. Les Tours de Samarante n'est d'ailleurs très probablement que le premier volet d'une série de romans qui se dérouleront dans ce même univers, complèteront l'histoire d'Oshagan et Cinabre et nous amèneront à connaître les bouleversements conséquents au Seuil.

Un scénario bof bof.

Je disais précédemment que le récit de Norbert Merjagnan peut être résumé facilement. C'est en effet le cas car sur les trois cents pages du livre, une bonne partie pourrait disparaître sans poser de problème.
Tout ce qui concerne Triple A, jeune homme qui rêve d'escalader les tours et qui se retrouve condamné à devenir une sentinelle désincarnée du système de surveillance de la ville, est, par exemple, sans réelle importance. C'est intéressant, cela permet de voir une certaine facette de la cité, mais ça ne fait pas avancer l'histoire d'une quelconque façon.
Les Tours de Samarante est surtout le récit du retour d'Oshagan dans la ville. il va affronter les dangers de ses quartiers les moins bien famés. Ainsi, il devra se sortir des griffes des Sculptes, ce qui permet à l'auteur de rajouter quelques pages qui rallongent le roman sans pour autant avoir d'intérêt.
À plusieurs reprises, le héros s'en sortira grâce aux précieuses armes climatiques qu'il possède. Ces capsules sont capables de perturber la météo et de générer des catastrophes naturelles destructrices. J'évoque là la deuxième « bizarrerie » de ce roman. Oshagan ne sait pas comment fonctionnent exactement les armes climatiques, mais quand il en utilise une, elle génère toujours un phénomène exactement adapté à ses besoins. De plus, lui-même survit à ces perturbations violentes du climat, même s'il s'y trouve en plein cœur. C'est typiquement le genre de facilité scénaristique qui peut me faire tomber un livre des mains.
À un moindre niveau, le lecteur pourrait être irrité par l'utilisation répétée de formes littéraires soutenues, qui font plus l'effet d'essais de style que d'une véritable démarche d'écriture pour l'intégralité du roman.

En fait, Les Tours de Samarante me fait un peu le même effet que La Horde du contrevent d'Alain Damasio : tout le monde a aimé, mais je ne sais pas vraiment pourquoi. Contrairement, toutefois, au pavé de vent précédemment cité, le roman de Merjagnan a l'avantage de se lire vite et facilement. C'est un livre divertissant, qui laisse un goût d'inabouti, d'imperfection, notamment parce qu'il laisse entendre qu'il faudra lire les futurs romans de l'auteur pour tout comprendre. Mais encore faudra-t-il avoir envie de les acheter...


[1] Bon. Il est vrai qu'à la même période, Eric Holstein livrait un avis plus mitigé sur le magnifique site d'ActuSF.
[2] Vieux chnoques pour qui j'ai beaucoup d'amitié, s'entend.
[3] Le Prix du Lundi n'est pas si prestigieux que cela, mais c'est quand même un assez bon indicateur de ce qui a plu au sein du microcosme de la science-fiction parisienne (au moins). Parfois à tort.
[4] Et encore !
[5] La fin de cette phrase contient un pléonasme.

Publié dans Littératures

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A
Toujours se méfier des livres encensés... Surtout quand les critiques se retrouvent sur x sites à la fois et émanent de quelques forums de connaisseurs...
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